Morcat. Journal 2014

créée le samedi 12 avril 2014, 12 h 10
modifiée le samedi 12 avril 2014, 12 h 16
Vendredi 11 avril 2014, minuit et demi.
Maître Ouchikh m’a transmis la “copie de travail” du jugement de la XVIIe Chambre. Je n’ai pas trouvé le temps d’en prendre connaissance en détail, mais j’ai découvert sans difficulté le paragraphe que citent à l’envi les commentateurs hostiles, et qui m’avait hier si fort étonné, à travers les bribes qui m’en arrivaient indirectement, par leur truchement. Le voici :

« Il apparaît de toute évidence à la simple lecture des propos poursuivis — dont il convient de rappeler, d’une part, qu’ils émanent d’un écrivain qui se dit particulièrement soucieux du choix des mots qui traduisent exactement sa pensée lorsqu’il s’exprime par la parole ou par l’écrit et, d’autre part, qu’ils ont fait l’objet d’une lecture lors de la réunion publique du 18 décembre 2010, Renaud CAMUS lisant une allocution qu’il avait auparavant rédigée et qui n’a donné lieu à aucune improvisation — que ces propos constituent une très violente stigmatisation des musulmans présentés comme des “voyous”, des “soldats”, “le bras armé de la conquête”, comme les auteurs de “vols”, d’“arrachements de sacs de vieille dame”, de “rackets au sein des écoles”, de “cambriolages”, d’“attaques à main armée”, de “trafic de drogue, comme des “colonisateurs” cherchant à rendre “la vie impossible aux indigènes”, à les forcer “à fuir, à évacuer le terrain”, “ou bien, pis encore, à se soumettre sur place, à s’assimiler à eux, à se convertir à leurs mœurs, à leur religion” en les sommant “de baisser le regard et de descendre du trottoir” devant eux, avec pour seul objectif de parvenir à prendre la place du peuple de France, à se substituer à lui, à éradiquer son histoire, sa culture, ses valeurs. »

Les journalistes qui citaient hier ce jugement n’avaient donc pas rêvé : j’y suis bel et bien accusé, et même convaincu, par définition, d’avoir présenté “les musulmans” en général comme des voyous, des soldats, le bras armé de la conquête, etc. Ce point, d’après mes juges, « apparaît même de toute évidence à la simple lecture des propos poursuivis ». Ces magistrats et moi n’avons manifestement pas la même idée de l’évidence, car dans les propos poursuivis ni au fond de mon âme je ne vois la moindre trace de pareille présentation des musulmans. Ces propos font partie d’un discours consacré à la nocence. Ils se rapportent donc à ce que j’appelle les nocents, les délinquants, les auteurs de vols, d’agressions, de cambriolages, d’arrachements de sacs de vieille dame, etc. Ils concernent les nocents musulmans, oui, et ils les désignent comme le bras armé de la conquête (musulmane). J’aurais très bien conçu d’être condamné pour cette assertion-là, qui correspond tout à fait à mes convictions ; mais je trouve amer de l’être pour une autre (les musulmans sont des voyous), qui n’a rien à voir avec elle, que je n’ai, bien sûr, jamais proférée et qui est totalement et radicalement étrangère à mon sentiment.

Cette affaire de bras armé prouve suffisamment, d’ailleurs, l’écrasement de sens et de catégories, l’“amalgame”, si j’ose dire, oserais-je écrire l’erreur de lecture qui a eu lieu, et qui, elle, pour le coup, me semble manifeste et évidente. Comment les musulmans pourraient-ils être le bras armé de la conquête musulmane, comme me le font dire mes juges ? Cette formule, bras armé de, prouve suffisamment qu’il y a deux entités bien distinctes, même si l’une se range à l’intérieur de l’autre : les voyous (musulmans), les musulmans en général. Jamais je n’ai dit ni pensé une seule seconde que les musulmans étaient des voyous.

Il me semble que rien ne serait plus facile ici que de pointer du doigt, comme je suis en train de le faire, l’éclatante mésinterprétation qui a commandé ce jugement, et que soulignent expressément ses attendus. Mais je me fais peut-être beaucoup d’illusions. L’évidence et même l’énormité que je vois à ce vice de raisonnement, la nécessité et l’urgence, l’apparente facilité de le corriger, plaident très fort en faveur d’un appel. Je reste néanmoins très partagé sur ce point. Un professeur de droit qui fut un temps un sympathisant et même un membre de l’In-nocence estime (mais il n’a pas eu le jugement sous les yeux, jusqu’à présent) que j’aurais toute chance de perdre de nouveau, en appel ; mais qu’en revanche existerait pour moi une quasi-certitude de l’emporter en cassation (!). Il ajoute que l’accès à la cassation coûte très cher.

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