créée le jeudi 24 octobre 2013, 12 h 09
modifiée le jeudi 24 octobre 2013, 12 h 09Mercredi 23 octobre 2013, minuit et demi. Le Monde qui doit paraître demain (et qui donc sera daté d’après-demain) contient un article du sympathique Jean Birnbaum à propos du nouveau livre d’Alain Finkielkraut, L’Identité malheureuse. Cet article était d’abord intitulé “Une déroute française”. Il a, depuis lors, changé de titre, et s’appelle beaucoup plus doucement “Alain Finkielkraut joue avec le feu”. Il m’est arrivé avec dix-huit heures d’avance, par les miracles de la Toile et des “alertes Google”, parce qu’il y était (fortement) question de moi ; et, comme je suis toujours abonné au Monde — à la grande indignation de la plupart de mes amis (politiques), qui trouvent scandaleux que je puisse subventionner l’organe officiel du remplacisme —, j’ai pu le voir en entier (et même en parler à Finkielkraut, qui tombait des nues, d’autant que c’était avant le changement de titre).
Birnbaum, annonçant son plan, prévient les lecteurs de L’Identité malheureuse que, lisant cet ouvrage, ils devront « faire la part du déjà-dit, de l’inédit, du non-dit aussi ». Je laisse de côté ici le déjà-dit et l’inédit, mais voici pour le non-dit :
« Mais si Finkielkraut se brûle au feu de l’identité, c’est peut-être qu’il ne s’appartient plus lui-même. Le ton et le lexique qui marquent l’écriture de ce livre manifestent une aliénation exaltée. Et c’est là qu’intervient le non-dit, qui a pour nom Renaud Camus. Avec les écrits politiques de ce dernier, L’Identité malheureuse partage des mots, des références et surtout la même obsession d’une double décadence : celle de la “Grande Déculturation” (par l’école) et celle du “Grand Remplacement” (par “l’immigration de peuplement”). Chez l’un comme chez l’autre, la France devient une “auberge espagnole” où les “Français qu’on n’ose plus dire de souche” ne savent plus où ils habitent. “Quand le cybercafé s’appelle “Bled.com” et que la boucherie ou le fast-food ou les deux sont halal, ces sédentaires font l’expérience de l’exil [...]. Ils n’ont pas bougé mais tout a changé autour d’eux”, écrit Finkielkraut. “Sur les lieux mêmes de ma culture et de ma civilisation je marchais dans une autre culture et une autre civilisation”, note Renaud Camus (Le Grand Remplacement, éditions David Reinharc, 2011).
« On pensait que L’Identité malheureuse marquait le retour de Finkielkraut à la prose politique après son essai sur l’amour. En réalité, ce nouveau texte sonne encore comme une protestation d’amour ; il témoigne d’une passion véhémente pour Renaud Camus. Car le châtelain du Gers n’y est pas seulement cité par son ami et protecteur, il le ventriloque littéralement. Cet élan affectif pourrait avoir sa beauté. Encore faudrait-il qu’il soit pleinement assumé. Et qu’Alain Finkielkraut précise jusqu’où va sa passion pour un écrivain qui a très officiellement déclaré sa flamme à la présidente du Front national. »
Deux “écrasements”, si l’on ose dire, et selon les plus classiques procédés de la damnatio memoriæ par assimilation (et anticipation) : de Finkielkraut sur moi, alors que nous sommes bien loin d’avoir les même vues ; de moi sur Marine Le Pen, dont les deux tiers du programme me sont totalement étrangers. Curieusement, dans les deux cas, les liens suggérés sont d’ordre amoureux : passion véhémente de Finkielkraut pour moi, déclaration de flamme de ma part à Marine Le Pen. Inutile d’écrire qu’ils sont aussi fantasmatiques les uns que les autres...
J’en reviens toujours à François Bayrou annonçant qu’il allait voter pour François Hollande — nul n’en a conclu qu’il était devenu socialiste, ou qu’il déclarait sa flamme au candidat socialiste. Moi j’ai voté pour Marine Le Pen parce qu’elle était, de tous les candidats, la moins éloignée de mes vues (et bien qu’elle en entretienne beaucoup qui sont fort éloignées des miennes) : ce me semble une flamme assez peu ardente. N’importe, elle suffira, avec un peu de tirage de cheveux, pour le bûcher de longue date apprêté de Finkielkraut.
voir l’entrée du mercredi 23 octobre 2013 dans Le Jour ni l’Heure
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