créée le jeudi 26 février 2015, 12 h 23
modifiée le samedi 28 février 2015, 18 h 52Mercredi 25 février 2015, minuit vingt. Mille fois on est amené, après avoir trouvé que les gens exagèrent, qu’ils vont trop loin, que leurs expressions sont trop fortes, et même déplacées, à réviser avec le temps, et parfois très vite tant l’histoire s’accélère, cette première opinion nôtre, et à donner tout à fait raison à ceux et à cela qui nous avaient semblé outrepasser les limites de la sagesse, voire celles de la simple décence.
Ainsi, pendant longtemps, j’étais indigné par tout rapprochement entre les divers gouvernements qui se sont succédé à la tête de la France depuis le début de ce millénaire, d’une part, les autorités de Vichy d’autre part, et avec elles le dessus du panier de la Collaboration. L’indignation m’a quitté, sur ce point. Certes je vois bien tout ce qui sépare, dans les modus operandi, l’occupation allemande pendant la dernière guerre et l’actuelle conquête dont nous faisons l’objet, et je ne songerais pas à comparer l’UOIF et la Gestapo ; en revanche je vois parfaitement en quoi les concepts de collaborateurs et de collaboration sont efficaces et pertinents, justifiés, pleinement justifiés, pour décrire la situation actuelle.
Pareillement j’avais trouvé que Laurent Lafforgue était allé tout de même un peu loin quand il avait écrit que faire appel aux plus éminents pédagogistes pour jeter les bases d’une reconstruction de l’École, c’était comme en appeler aux Khmers rouges pour constituer un groupe d’experts sur la promotion des Droits humains.
Je juge aujourd’hui, non seulement qu’il n’avait pas tout à fait tort, ce que bien entendu j’ai toujours pensé, mais que son image, pour choquante qu’elle ait pu paraître, avait le mérite de bien montrer la vérité : à savoir que les éternelles réformes et re-réformes du système scolaire étaient entre les mains des individus les plus acharnés, par inculture, par idéologie, par ressentiment, par dogmatisme, par sincérité la plupart du temps, à le détruire.
J’entendais à midi, à la radio, un M. Michel Lussault, qui préside je ne sais quelle dix-millième commission sur ces questions-là. Il s’agissait en l’occurrence du “bagage culturel minimum” que l’élève doit absolument retirer de ses années de scolarité. L’homme a parlé trois quarts d’heure sans qu’une seule fois soient mentionnés dans ses propos un grand artiste, un grand poète, une œuvre de génie, une merveille du patrimoine, l’art roman, l’architecture classique, les jardins, le paysage français, la langue française, quelque épisode marquant que ce fût de l’histoire de France. Ces gens n’ont qu’une seule obsession, lutter contre les inégalités, mettre fin à la sélection, terrasser la discrimination (et, implicitement, consacrer la colonisation) — le tout exprimé dans un jargon technocratique de leur invention, ridicule et vide. Au demeurant M. Lussault fait bien de s’en tenir au jargon, car lorsqu’il en sort on obtient ceci :
« Je voudrais que nous puissions organiser des débats autour de qu’est-ce que c’est une culture commune ».
Et pour s’assurer que nous avons bien compris l’invité revient à la charge quelques minutes plus tard et nous promet « une réflexion sur qu’est-ce que c’est qu’une culture démocratique ? ». Quelque mauvais plaisant à très mauvais esprit doit être fortement tenté de répondre :
« C’est exactement cela »
ou bien :
« La réponse est dans la question ».
Quoi qu’il en soit, pas une seconde nous ne devons nous laisser distraire de cette certitude : que le sort scolaire des enfants de ce pays, et beaucoup de leur sort tout court, et celui du pays lui-même par voie de conséquence, dépendent de personnalités universitaires et intellectuelles qui peuvent parfaitement dire, et sans ciller le moins du monde :
« Je voudrais que nous puissions organiser des débats sur qu’est-ce que c’est une culture commune ? ».
voir l’entrée du mercredi 25 février 2015 dans Le Jour ni l’Heure
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