Âme qui vive. Journal 2020

créée le vendredi 27 novembre 2020, 12 h 39
modifiée le vendredi 27 novembre 2020, 19 h 06
Plieux, jeudi 26 novembre 2020, minuit.
Me Rimokh avait découvert hier matin, juste avant le procès, que l’audience devait être présidée par Mme Sophie Combes, qui fut secrétaire général du Syndicat de la Magistrature, et l’était au moment de l’épisode fameux dit “du mur des Cons”. Cela semblait suffisant à mon avocat pour introduire une requête en “légitime suspicion”, et pour demander un renvoi. Je n’étais pas très favorable à pareille demande, à ce stade. J’étais déjà à Paris, à grands frais et non sans quelque fatigue, trois jours de travail étaient perdus, je ne souhaitais pas que ce fût pour rien, et que tout cela fût à recommencer dans quelques semaines ou quelques mois. 

Rimokh s’est rendu à mes imprudentes raisons. Très bien, dans ce cas on allait plaider. Et peut-être la composition de la cour telle que nous la découvrions à la dernière minute va-t-elle peser sur la décision de justice, qui doit être rendue le 10 février prochain ; mais je dois dire qu’elle n’a semblé influer en rien sur la façon peu reprochable, il me semble, dont furent menés les débats. J’ai déjà connu des circonstances de ce genre, à la vieille XVIIe Chambre, celle qui était encore dans la Cité : cour parfaitement courtoise, distancée, distançante, professionnelle, objective — qui d’ailleurs ne m’en a pas moins condamné avec une grande sévérité, là n’est pas la question. Celle d’hier était tout à fait dans la même attitude de neutralité assumée, et sans doute jouée, mais peu importe. Je n’en tire pas la moindre conclusion quant à la sentence à venir. Il reste qu’il est bien agréable, et devrait être tout à fait normal, la norme, la loi, de n’avoir pas à affronter une cour haineuse, incroyablement agressive, comme l’était celle d’Auch il y a un an exactement. Celle d’hier était comme ces institutions devraient l’être toujours, polie, formaliste, procédurale. La magistrate qui tenait le rôle de rapporteur, à droite de la présidente, c’est-à-dire à sa gauche, a même exposé le dossier avec beaucoup d’objectivité et de sérénité. Tout juste me suis-je permis de faire remarquer très poliment, je crois, quand elle m’a donné la parole à l’issue de sa présentation, que le tweet incriminé n’avait pas de lien direct avec mes vues sur le Grand Remplacement car je ne croyais pas à une substitution mécanique des populations, selon un principe de vases communicants, et, position qui me sépare radicalement de la plupart des partisans de la thèse du Grand Remplacement, je suis favorable à la décroissance démographique partout, y compris en Europe et en France, et je n’en appelle nullement à des politiques natalistes, bien au contraire. J’aurais pu ajouter, mais Me Rimokh l’a précisé au cours de sa plaidoirie, que j’étais l’auteur de l’essai “Pire que le mal” (recueilli dans Le Communisme du XXIe siècle puis dans La Seconde Carrière d’Adolf Hitler), sous-titré “Deux remèdes impossibles” (au Grand Remplacement), ces deux remèdes étant les politiques natalistes et… Jean-Marie Le Pen.

Un jeune philosophe iranien, monarchiste, je crois, qui était là avec son épouse historienne d’art, n’en revenait pas que la salle ne fût pas pleine, que tous les intellectuels, écrivains, philosophes que compte notre pays ne fussent pas présents pour me soutenir dans un procès qui est selon lui celui de la liberté de l’esprit, de la liberté d’expression, de la liberté tout court, de tout ce qui a fait la grandeur de notre nation et son prestige à l’étranger — je continue de citer comme je peux, en traduisant, car ce jeune homme ne parlait qu’anglais, ce qui fait qu’on se demande ce qu’il comprenait des débats, mais sa femme francophone lui servait d’interprète. Le malheureux se fait d’évidence bien des illusions et sur ma situation personnelle (je ne dispose d’aucun soutien déclaré dans l’élite intellectuelle reçue comme telle) et sur le degré de conscience qui règne en France quant aux enjeux actuels pour la pensée et pour l’existence même de la culture. Les trois seules personnalités à s’être déplacées étaient Karim Ouchikh, qui était assis à mon côté, Jean-Yves Le Gallou, toujours très amical à mon égard, et François Bousquet, le rédacteur en chef d’Éléments, qui a publié aujourd’hui même un magnifique article sur l’audience, trop flatteur à mon endroit pour je puisse sans quelque indécence le vanter comme il le mériterait, mais dont je puis du moins célébrer la qualité qu’il a de rendre pleine justice à Me Rimokh.

Le Figaro publie un article assez factuel et descriptif, mais qui commence par me qualifier d’“écrivain d’extrême droite” et s’achève sur ce paragraphe :

«La thèse conspirationniste du “grand remplacement”, populaire dans les milieux d’extrême droite, dénonce une prétendue substitution des populations blanches européennes et chrétiennes par des immigrés de couleur, majoritairement musulmans ».

La majorité des commentateurs proteste un peu sur prétendue. L’un d’entre eux estime que « L’immense majorité de la population française pense que le fond des propos de Camus est justifié. Il n’y a d’ailleurs dans les propos tenus aucune insulte, aucune injure, juste de l’humour un tantinet caustique, mais sur fond de faits avérés. »

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