Une préface affligeante pour une prose moisie
Par Philippe Sollers
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Je reprendrai le mot que Claude Durand a utilisé à mon égard: «affligeant». Cette préface, où Claude Durand tente de noyer le poisson, est proprement affligeante. Il cherche à rejeter la responsabilité sur d'autres en affirmant, par exemple, que j'ai publié des textes antisémites de Nabe [dans la revue l'Infini, dirigée par Sollers, NDLR], ce qui est complètement faux. Claude Durand fait de tout ça une affaire médiatique avec dénonciation d'un complot pour mieux masquer son embarras face à une oeuvre qui comportait des passages qu'il a jugés publiables, puis qu'il a retirés quand on les a remarqués, et enfin qu'il remplace aujourd'hui par des blancs, ce qui n'arrange rien à l'affaire. L'erreur de Claude Durand est avant tout littéraire: il pense que Renaud Camus est un écrivain important, alors que c'est de la prose moisie [Il cite un passage de La Campagne de France: «L'origine est à mes yeux l'une des plus précieuses saveurs des êtres et des pensées et des phrases dont j'aime qu'elles charrient un peu de leur terre et de leurs ciels et de l'histoire... que l'origine des êtres et des idées soit perceptible c'est un motif pour les aimer davantage, jamais pour les aimer moins»]. Quand je lis ça, je trouve que c'est complètement cucul, vieillot et barbant. Moi, si je suis éditeur et que je lis ça, je ne publie pas. C'est de l'antisémitisme convenable, le plus dangereux de tous. C'est également un symptôme qui n'en finit pas et que l'on doit à l'ère Mitterrand: je vois Bousquet le matin et je vais à SOS Racisme l'après-midi. Ce vieil antisémitisme français un peu glauque est une tradition qui doit disparaître.

Philippe Sollers